Photo: Marvin Zilm / 13 Photo
Les droits de l’enfant ne sont pas toujours respectés? Dans un pays démocratique, progressiste et respectueux de l’État de droit comme la Suisse? Hélas, non!
Car les autorités et personnes en charge de l’éducation ont tendance à préconiser une surprotection, qui peut s’avérer néfaste pour la mise en œuvre des droits de l’enfant.
Notre directrice, Irène Inderbitzin, s’est entretenue avec le magazine pour parents «Fritz+Fränzi» sur les préoccupations des enfants qui s’adressent à nous, l’Office de l’ombudsman des droits de l’enfant Suisse. Elle explique notamment les responsabilités ainsi que le déroulement des consultations proposées par l’Office de l’ombudsman et les causes des violations des droits de l’enfant.
Sujets de préoccupation des enfants
Le plus souvent, les enfants qui contactent l’Office de l’ombudsman des droits de l’enfant sont exposés à des situations de divorce conflictuel ou de placement extra-familial dans le cadre de procédures de protection de l’enfance. Ils se sentent ignorés, trop peu écoutés, et insuffisamment informés et pris au sérieux dans des situations pourtant hautement préoccupantes pour eux.
Irène Inderbitzin donne un exemple: «Nous avons été contactés par une jeune fille qui avait déjà changé de foyer à de multiples reprises. Elle avait dû être placée car sa mère souffrait de troubles mentaux et n’était plus en mesure de la prendre en charge en tant que mère célibataire. Mais personne n’avait jamais cherché à entendre l’adolescente ou à trouver une solution avec elle. La situation s’est envenimée jusqu’à ce qu’elle se retrouve dans un foyer fermé pour cause de risque suicidaire. Pourtant, elle n’avait qu’un seul souhait, se rapprocher à nouveau de sa mère». Grâce à l’Office de l’ombudsman, la jeune fille a pu obtenir la réouverture de son dossier par l’APEA et le placement dans une famille d’accueil plus proche de sa mère.
Pour que l’audition ne soit plus une exception
Triste mais vrai: en Suisse, seulement 10% des enfants sont entendus par le tribunal dans le cadre des procédures de divorce. Or celles-ci impliquent des décisions cruciales pour eux, notamment en ce qui concerne leur futur lieu de résidence ou les contacts avec leurs personnes de référence.
Même si le divorce est décidé d’un commun accord entre les parents, les enfants doivent pouvoir exprimer leur volonté. Il est essentiel qu’ils se sentent pris au sérieux et impliqués. Ce n’est qu’ainsi qu’ils peuvent s’affirmer et renforcer leur résilience pour faire face aux enjeux et crises futurs.
Des défaillances dans le système judiciaire
Outre le droit à l’information et celui d’être entendus, on omet souvent de proposer aux enfants une représentation juridique adaptée capable de défendre de manière appropriée leur volonté dans la procédure. Or cela est essentiel pour l’enfant, notamment en cas de placement extra-familial, pour éviter qu’il ne se sente impuissant ou exclu. C’est pourquoi à l’Office de l’ombudsman des droits de l’enfant Suisse, nous tentons de remédier à ces défaillances chaque fois qu’un signalement nous est fait. Et sur le long terme, l’objectif est de faire en sorte que de telles situations ne se produisent plus.
Ce que nous faisons – et ce que nous ne faisons pas
Lorsque des enfants s’adressent à l’Office de l’ombudsman, nous veillons avant tout à ce qu’ils se sentent pris au sérieux et écoutés. Nous menons des entretiens adaptés à leur âge en essayant de faire le point sur la situation. Que se passe-t-il? Qui sont les personnes concernées? Qu’est-ce qui affecte l’enfant? Après cette première analyse de situation, nous présentons à l’enfant les différentes possibilités à sa disposition et l’aide que nous pouvons lui fournir. S’il le souhaite, l’Office de l’ombudsman peut également servir d’intermédiaire avec les professionnels concernés et émettre des recommandations.
En revanche, l’Office de l’ombudsman n’est pas habilité à mener lui-même les procédures. Nous veillons seulement à ce que l’enfant soit pleinement respecté par le système judiciaire, c’est-à-dire que les professionnels concernés appliquent les droits de l’enfant.
Causes des défaillances au sein du système judiciaire
Mais pourquoi les droits de l’enfant ne sont pas toujours appliqués ou de manière insuffisante? D’une part par manque de personnel et de temps, et d’autre part car il persiste la conviction que les adultes sont les mieux placés pour savoir ce qui est bon pour les enfants.
«La plupart du temps, cette approche est motivée par le désir de protéger l’enfant. On veut le maintenir en dehors des conflits. Mais les enfants remarquent tout de suite quand quelque chose ne va pas. C’est pourquoi il est impératif que les adultes informent les enfants de manière adaptée à leur âge plutôt que de chercher à les épargner », explique Irène Inderbitzin.
Les enfants sont des personnes à part entière. Ils veulent être informés, savoir ce qui va leur arriver. Chaque enfant doit pouvoir s’exprimer, donner son avis et faire part de ses souhaits s’il le souhaite.
Les droits de l’enfant sont l’affaire de tous!
Les professionnels ne sont pas les seuls à pouvoir défendre les droits de l’enfant. Nous pouvons tous, à titre individuel, encourager les enfants à s’impliquer davantage, à donner leur avis et à faire valoir leurs souhaits. Et nous nous devons tous d’être attentifs, que ce soit en tant que voisins, enseignants, assistants maternels ou responsables d’associations. Proposez votre aide plutôt que de détourner le regard lorsqu’un enfant se trouve dans une situation difficile! Car la famille n’est pas une affaire privée lorsqu’il s’agit du bien-être des enfants.
Cliquez ci-dessous pour lire l’interview d’Irène Inderbitzin dans son intégralité, parue dans le dernier numéro du magazine pour parents «Fritz+Fränzi».