5A_121/2018 - Tribunal fédéral, IIe Cour de droit civil Arrêt du 23 mai 2018 en la cause de C. contre A., B.

Faits: B. a quitté son pays d’origine, l’Iran, en 2011, pour se réfugier en Grèce, où elle a fait la connaissance de A., chez qui elle a été hébergée. Celui-ci l’aurait forcée à entretenir des relations sexuelles sous la menace de l’expulser de chez lui et de ne plus subvenir à ses besoins.

Le 3 avril 2014, B. et A. se sont mariés à l’Ambassade d’Afghanistan à Sofia en Bulgarie.

L’enfant C. est né en 2015 à Athènes, en Grèce ; B. soutient que son fils est issu d’un viol.

Six mois après la naissance de C., la famille a quitté la Grèce pour se rendre en Finlande, où elle a déposé une demande d’asile qui a abouti à un rejet. Après une période de six à sept mois passée en Finlande, la famille s’est rendue une semaine en Suède, auprès de la famille de A., puis en Norvège. Dans ce pays, le père a confié son épouse et leur fils à la soeur d’un ami, E., avant de repartir le jour même en Suède.

Le 26 août 2016, B. s’est rendue en avion avec son fils en Suisse. Ils ont vécu une semaine chez E., puis à V. (VD) au sein d’un centre de l’Établissement vaudois d’accueil des migrants (ci-après : EVAM). Actuellement, B. vit à U. (VD), dans un logement financé par l’EVAM. Elle a déposé une demande d’asile en Suisse.

Par demande du 5 juillet 2017, A. a requis de la Chambre des curatelles du Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après : Chambre des curatelles) que le retour de l’enfant C. en Grèce soit ordonné (I), qu’il soit ordonné à la mère, sous la menace de la peine d’amende de l’art. 292 CP, de remettre immédiatement l’enfant C. au Service de protection de la jeunesse (ci-après : SPJ) afin que celui-ci se charge de le lui remettre, respectivement se charge du rapatriement de celui-ci auprès de lui en Grèce (II), et que le SPJ se charge de l’exécution des chiffres I et II, le cas échéant avec le concours de la force publique.

Parallèlement à cette procédure, A. a déposé une requête de retour auprès de l’Office fédéral de la justice (ci-après : OFJ) le 20 février 2017.

Par ordonnance du 6 juillet 2017, la Chambre des curatelles a nommé une curatrice à l’enfant C.

Par déterminations du 20 juillet 2017, la curatrice de l’enfant a conclu à l’admission de la requête de retour de l’enfant, sous réserve qu’il puisse être établi que l’enfant et sa mère pourraient obtenir un permis de séjour en Grèce et qu’ils bénéficieraient des conditions d’existence conformes à la dignité humaine. A défaut, elle a conclu au rejet de la requête.

Dans sa réponse du 21 juillet 2017, B. a conclu au rejet de la requête de retour de l’enfant, soutenant que le déplacement de son fils n’était pas illicite et que les exceptions au retour de l’enfant étaient réalisées.

Le 25 juillet 2017, la curatrice de l’enfant a transmis à la Chambre des curatelles un courriel du conseil grec du requérant indiquant que le mariage des parents n’était pas reconnu par la Grèce et a modifié ses conclusions en ce sens que la requête de retour de l’enfant devait être rejetée car la dernière résidence de l’enfant se situait en Finlande.

Le 26 juillet 2017, le père a persisté dans ses conclusions, exposant que les parties n’avaient jamais eu l’intention de s’établir en Finlande.

Sur réquisition de la Présidente de la Chambre des curatelles, le père a notamment produit une copie de la décision octroyant à l’enfant C., un permis de séjour en Grèce en qualité de réfugié pour une période de trois ans, du 5 mars 2017 au 4 mars 2020, une attestation du 7 avril 2015 remise par les autorités grecques indiquant que la mère était titulaire d’un permis de séjour « en instance » en Grèce dont la validité était reportée jusqu’à l’octroi d’un permis de séjour valable trois ans, ainsi qu’un courriel de son conseil grec relevant que l’interprétation que la curatrice avait faite de son précédent courriel était incorrecte.

Statuant par arrêt du 3 août 2017, expédié le 14 août 2017, la Chambre des curatelles a rejeté la requête de retour de l’enfant.

Statuant sur le recours en matière civile interjeté par A. le 31 août 2017, la IIe Cour de droit civil du Tribunal fédéral a, par arrêt du 11 octobre 2017 (5A_655/2017), admis le recours, annulé l’arrêt rendu le 3 août 2017 et renvoyé la cause à l’autorité cantonale aux fins qu’elle établisse les faits en relation avec la résidence habituelle de l’enfant avant son déplacement en Suisse, le contenu du droit étranger applicable et, le cas échéant, l’éventuelle réalisation de l’une des exceptions de l’art. 13 al. 1 et 2 CLaH80, puis qu’elle statue à nouveau sur la cause.

Invités à se déterminer sur l’arrêt de renvoi par la Chambre des curatelles, le père s’est référé à l’ensemble de ses écritures et a conclu au retour de l’enfant à destination de la Grèce, la mère a persisté dans ses conclusions en rejet de la requête de retour et la curatrice de l’enfant a requis des garanties concernant une autorisation de séjour de la mère en Grèce et le bénéfice de conditions indispensables à la prise en charge de l’enfant dans ce pays, en particulier la garde de l’enfant jusqu’à la fin de la procédure au fond statuant sur cette question.

Par courrier du 20 novembre 2017, l’Autorité centrale grecque a certifié qu’en cas de retour de l’enfant en Grèce, la mère n’était pas obligée de reprendre la vie commune avec le père, expliqué que jusqu’à la décision finale en matière d’attribution de la garde, la mère pourrait demander une ordonnance provisoire, et rappelé que la mère, en qualité de réfugiée reconnue, bénéficiait toujours d’un droit de séjour en Grèce, dont l’éventuel renouvellement pouvait être requis sur Internet.

Par écriture du 24 novembre 2017, la curatrice de l’enfant a exposé qu’elle considérait que l’Autorité centrale grecque n’était pas en mesure de garantir qu’en cas de retour en Grèce, l’enfant serait confié à sa mère jusqu’à la fin de la procédure au fond, estimant qu’il s’agissait d’une condition sine qua non au retour de l’enfant dans ce pays.

Par arrêt du 8 janvier 2018, la Chambre des curatelles a ordonné le retour en Grèce de l’enfant C. et ordonné à la mère, B., sous la menace de la peine d’amende de l’art. 292 CP, de ramener l’enfant en Grèce dans un délai au 20 février 2018.

Par acte du 5 février 2018, l’enfant C., par sa curatrice, exerce un recours en matière civile au Tribunal fédéral, comprenant une requête d’effet suspensif (5A_121/2018).

Par réponse du 19 février 2018, le père, A. conclut au rejet du recours de C. et au refus de l’effet suspensif sollicité. L’intimée n’a pas déposé d’observations.

Par acte du 8 février 2018, B. exerce également un recours en matière civile au Tribunal fédéral (5A_132/2018), comprenant une requête d’effet suspensif et une demande d’assistance judiciaire pour la procédure fédérale.

Par réponse du 23 février 2018, A. conclut au rejet du recours et l’enfant à son admission.

Par ordonnance du 1er mars 2018, le Juge instructeur de la IIe Cour de droit civil du Tribunal fédéral a joint les causes 5A_121/2018 et 5A_132/2018 et octroyé l’effet suspensif aux recours.

 

FamPra 01/2019, Page 282 ff.