Nous exigeons des auditions adaptées aux enfants

19 novembre 2023

Le dernier numéro du magazine «undKinder» de l’Institut Marie Meierhofer pour l’enfant a consacré tout un dossier au droit à la participation des enfants. Dans ce cadre, nous avons eu l’honneur de rédiger un article détaillé sur le sujet, qui aborde la question du point de vue du système judiciaire. Sur notre site, nous avons mis en ligne trois blogs qui reprennent les points essentiels de cet article, intitulé «Protéger les enfants grâce à la participation». Dans le présent blog, qui en constitue la troisième et dernière partie, nous souhaitons conclure en rappelant l’importance d’une audition adaptée aux enfants.

En tant qu’Office de l’Ombudsman des droits de l’enfant Suisse, nous veillons à ce que les mineurs se voient garantir l’accès au système judiciaire et aux possibilités de recours existantes. Nous intervenons chaque fois qu’un enfant nous contacte de sa propre initiative. Nous l’informons de ses droits et mobilisons des professionnels sur place pour que les droits de l’enfant soient respectés.

Notre cadre normatif repose sur les lignes directrices du Comité des ministres du Conseil de l’Europe sur une justice adaptée aux enfants et la Convention des Nations unies relative aux droits de l’enfant:

Participation

Pour qu’un enfant puisse participer à une procédure judiciaire, c’est-à-dire avoir droit au chapitre, il est essentiel de l’informer de ses droits et du déroulement de la procédure de manière adaptée à son niveau de développement. Les professionnels concernés doivent veiller à ce que l’enfant comprenne les démarches effectuées et celles à venir. Ces informations sont essentielles pour lui permettre d’exprimer son opinion, ses souhaits et ses préoccupations de manière ciblée lors de l’audition.

Malheureusement, le droit à la participation, en particulier le droit d’être entendu, n’est pas toujours respecté et accordé aux enfants en Suisse, comme le montre l’exemple d’Elina et d’Eliza:

 

Exemple de consultation – droit du divorce

Elina (12 ans) et Eliza (10 ans) contactent en ligne l’Office de l’Ombudsman des droits de l’enfant Suisse. Elina en a entendu parler via un copain d’école. Leurs parents sont en instance de divorce. Les sœurs ont appris que leur mère et leur père avaient tous deux demandé la garde exclusive. Elina et Eliza n’ont pas été invitées à donner leur avis, et n’ont pas non plus été informées de leurs droits dans la procédure de divorce. Les deux jeunes filles sont en colère, désespérées et désemparées: les adultes peuvent-ils simplement décider de leur vie à leur place?

Nous informons les deux sœurs par téléphone de leurs droits, notamment de leur droit d’être entendues (audition par un juge) et d’être représentées par un avocat. Nous leur conseillons également de contacter la juge directement (par téléphone ou par courrier) pour demander une audition. De leur côté, elles demandent à être défendues par un avocat. Après plusieurs semaines sans nouvelles de la juge, elles nous rappellent pour nous demander de les aider à nouveau. Elles nous autorisent à prendre contact directement avec la juge. Après un entretien de conciliation avec la juge, une audition est organisée et la demande de désignation d’un avocat est acceptée. Dans le cas d’Elina et d’Eliza, plusieurs droits n’ont pas été respectés: le droit d’être entendues et d’exprimer leur opinion, le droit à l’information et le droit d’être représentées par un avocat. En tant qu’Office de l’Ombudsman des droits de l’enfant Suisse, nous avons pu éviter les conséquences d’une absence d’audition, à savoir que le tribunal décide sans connaître la volonté subjective des filles; et nous avons veillé à ce que les jeunes filles soient représentées au tribunal.

 

L’audition, un élément central de la participation

L’audition constitue un élément central de la participation des enfants à toute procédure les concernant. Selon la procédure et le domaine juridique, l’audition peut porter des noms différents:

Participation

Mais de manière générale, l’idée reste la même: garantir le droit de l’enfant à exprimer sa volonté subjective. Comme le montre l’exemple d’Elina et d’Eliza, il n’est pas toujours évident d’obtenir une audition. Pourtant, en psychologie du développement, on considère que les enfants sont capables, dès l’âge de six ans en moyenne, d’exprimer par des mots leurs opinions et leurs souhaits sur les questions qui les concernent ou de les communiquer verbalement à une personne étrangère. Toutefois, cette limite d’âge n’est pas universelle. Il convient d’adapter les mesures prises au stade de développement de l’enfant et à la question posée. Le renoncement à une audition peut être envisagé à titre exceptionnel, par exemple lorsqu’il est évident que l’enfant ne peut ou ne souhaite pas exercer son droit d’être entendu. La lettre de convocation à l’audition doit informer l’enfant de son droit de participer au processus décisionnel en cours et de s’exprimer sur sa situation. Elle doit inciter l’enfant à se rendre à l’audition. 

Participation

ParticipationParticiper permet de gagner en confiance

Sur le plan psychologique, il peut être très bénéfique pour les enfants d’exprimer leur volonté subjective lors de processus décisionnels importants. En effet, le développement de l’enfant dépend de sa capacité à comprendre ce qui se passe autour de lui, en particulier en cas de situations stressantes. Une discussion ouverte peut avoir un effet apaisant, en particulier pour les enfants inquiets ou perturbés. Les informations reçues leur permettent de classer leurs impressions, de réfléchir à leur situation et de mieux s’adapter aux changements à venir. Faire l’expérience de leur propre efficience est également très bénéfique pour les enfants. Le fait de savoir que ce qu’ils disent ou font a de la valeur permet aux enfants de reprendre confiance lors de situations difficiles. Pour les enfants en situations stressantes, il est également essentiel de pouvoir s’adresser à des personnes qui se soucient de leur bien-être et s’intéressent sincèrement à eux. 

 

Accompagnement des professionnels concernés

Vous avez des questions sur le thème des auditions d’enfants et de jeunes? Ou souhaitez suivre une formation en la matière? N’hésitez pas à nous contacter, nous sommes là pour vous conseiller. Sur notre portail de formation, vous trouverez également des offres de formation adaptées. Et surtout, n’hésitez pas à informer les enfants et les jeunes autour de vous (sphère privée ou professionnelle) de notre offre de consultations gratuites. 

Pour en savoir plus sur la participation comme outil de protection des enfants, consultez notre article détaillé paru dans le dernier numéro du magazine «undKinder» de l’Institut Marie Meierhofer pour l’enfant.